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Archive pour la catégorie ‘Italia mia’

Ciao Roma…

Dimanche 23 juillet 2006

gianicolo
Ci vediamo ?oh la la… Pas du tout envie de retourner au taf demain…PS : c’est bon, j’ai pu entrer à Saint-Pierre !

Italia s’è desta

Dimanche 9 avril 2006

Rien à voir, mais note pour plus tard : au Parc Monceau, ne pas s’écouter Your disco needs you de Kylie à fond pour se donner du courage et faire un dernier tour en sprintant à toute vitesse : risque de semi-syncope et en tout cas grosse et inquiétante nausée… :?

Bon : ok les ritaux, c’est maintenant que ça se passe. Ça fait cinq ans que je tente d’expliquer que “c’est plus compliqué que cela” à tout ceux qui me disent que vous n’êtes que des guignols qui votez pour celui qui a la plus grosse gourmette, alors maintenant va falloir montrer que vous aviez juste besoin de vous faire peur, que c’était le dernier soubresaut légitime de vos illusions, le dernier hoquet de vos divergences sociétales, mais que désormais vous souhaitez passer aux choses sérieuses, même si ça promet d’être moins glitter.

On ramasse les copies demain et on regarde ce que ça donne à 15 heures, si j’ai bien compris. Les résultats seront ici.

Pour illustrer ce post spécial Italie, et dans un soucis purement informatif, je relaie la nouvelle campagne de pub pour les mutande de chez Dolce & Gabbana, qui ont fait appel à quelques footeux italiens pour servir de modèles. Je ne trippe pas spécialement sur les calciatori, mais ils ont semble-t-il laissé tomber la mode immonde des cheveux mi-longs avec serre-tête (sauf un qu’ils ont un peu caché au fond des photos), et c’est quand même bien mieux comme ça. Comme quoi, ils sont sur la bonne voie.

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Italia mia (fin)

Vendredi 17 mars 2006


Calcio
Lu dans un petit bouquin intéressant, que l’on m’a offert (mon goût pour l’Italie est une aubaine pour tout ceux qui ont un cadeau à me faire) :

«Il y a donc dans les clichés et dans les pulsions qui commandent le rapport à l’Italie, quelque chose qui dépasse le conjoncturel, et qui tient autant, sinon plus, au sujet regardant qu’à l’objet regardé. On peut hasarder l’hypothèse qu’il existe en France (et en Europe), un «désir d’Italie», contradictoire, mais profond. Tout se passe comme si l’Italie accomplissait pour les imaginaires étrangers une sorte de fonction universelle, en étant le lieu rêvé du «principe de plaisir», du défoulement, du relâchement des normes, l’autre visage en somme du «principe de réalité» et de l’éthique du labeur. L’Italie, dans cette hypothèse, offre aux pays d’ordre et d’autorité d’Europe du Nord la réalisation d’un besoin fondamental de désordre et de désobéissance, sans laquelle il n’y a pas d’équilibre vital (c’est du moins ce que soutiennent les psychologues). Il y aurait ainsi, dans cette Italie «désirée», l’antidote idéal aux lois rigides du productivisme nordique : et ce, indépendamment, ou en tout cas au-delà, de ce qu’est en réalité la Péninsule.»
Marcelle Padovani, L’Italie des Italiens, Seuil

Il y a bien de cela, je crois. Et que ce désir d’Italie soit indépendant de ce qu’est en réalité la Péninsule, tu m’étonnes !

Il faudrait que j’achève cette petit saga, qui commença avec mon imagination enfantine, et finit sur ses cendres. Mais je suis un peu coincé, à présent. Lorsqu’il s’agissait de décrire ces quelques fuites imaginaires de l’autre côté des Alpes, ma mythologie personnelle concernant ce pays, c’était facile, car subjectif. A présent, si je voulais poursuivre le récit, il me faudrait tout naturellement parler de la réalité que j’ai trouvée là-bas, au cours des quelques voyages qui ont suivi le premier. Et là, ça devient plus rigoureux, je ne voudrais pas enfiler des poncifs, comme “oh la la, ils conduisent n’importe comment” ou “c’est vrai qu’ils ont de bonnes pizzas”.

Si je voulais rester dans le domaine du subjectif, il faudrait seulement que je dise à quel point ce pays ne correspondait effectivement pas à l’image que je m’en faisais. Comment dire ? Moins glamour, moins esthète. Beaucoup plus grave, d’ailleurs, malgré les grands gestes et les rires forts. Malgré la si vantée dolce vita, il y règne un sentiment d’infortune, dans tous les sens du terme. Et forcément plus d’inquiétude qu’il n’y paraît. Mais toujours cette nonchalance, désordonnée et drôle. Drôle de cet humour si particulier, si sonore et si tendre, à l’arrêt du bus qui n’arrive pas, devant le gardien du musée qui est parti on ne sait où, devant l’usine qui ferme ou la mort qui rode. Et toutes ces mises en scène se jouent sous le projecteur-poursuite du soleil qui n’appartient qu’à ce pays, et qui fait resplendir jusqu’à la dernière pierre.

Enfin, dois-je le dire, je n’y ai jamais vraiment croisé le bataillon sacré d’apollons aux dents blanches que je me figurais y trouver…

Mais peu importe. Ce pays était si différent, au final, que la découverte de cette réalité a renouvelé, je crois, ma curiosité, en la débarrassant de ses présupposés imaginaires. Je l’ai accepté et je continue de m’évader en gardant un oeil sur ce qui se passe là-bas. Lorsque les débats français m’épuisent d’être rabâchés, je lis le Corriere pour savoir de quoi on parle à Rome ou à Naples. Lorsque TF1 me désespère, je regarde la Rai Uno pour l’être davantage. Quand j’ai envie de connaître d’autres épisodes de l’Histoire, je lorgne au-dessus des Alpes. Et quand vient l’été, j’essaie de les franchir pour de bon.

Si j’y avais eu la moindre de mes origines, j’aurais pu dire que l’Italie était un second pays. Mais ce n’est pas vraiment cela. De tout ce que j’ai dit, il ressort autre chose : l’Italie devenue pour moi un pays en plus.

Italia mia (7)

Jeudi 5 janvier 2006

Napoli
L’aéroport, grand comme une gare routière. Les marchés dans les rues. Les clopes à côté des poissons, des fringues et des calamars dans des impasses perdues et très mystérieuses. Ces vendeurs qui ont tapé sur les portes cochères pour alerter la bande quand les carabiniers sont arrivés. Le bordel. La circulation autogérée où chacun fait ce qu’il veut à condition que ça passe. Et les piétons qui font de même. La vue magnifique lorsqu’on grimpe dans les hauts quartiers. Les gamins dans les rues. Le ciel de linge dans les ruelles. Les petits autels éclairés au néon flanqués sur les murs. Les églises. Les gens à genoux au fond du Duomo. Le sang liquéfié de San Gennaio. Les images pieuses de Padre pio. La goutte d’essence de café au fond des tasses. Les m’as-tu-vu de Salerne sur le corso Vittorio Emmanuelle. Les fresques vieillies de la vieille ville. Les erreurs drôlement fréquentes de certains commerçants qui nous rendaient la monnaie, encore en lires à l’époque. Le silence de Pompéi. Les sillons des chars, dans les rues pavées. L’école des gladiateurs où je me suis symboliquement battu avec A. Le réfectoire de la fac de Salerne. La pasta en entrée. Les pullmans de la SITA et leur chauffeur fou dans les virages ravinesques de la côte amalfitaine. Amalfi, perchée sur son rocher. La chaleur, le soleil et la mer en février. Le festival de Sanremo. Les pâtes, con le vongole. Et ce martini bu sur le lungomare.Puis à nouveau le petit aéroport. L’attente. Le vol. Paris. Le froid, la pluie. Encore quelques centaines de kilomètres à l’Est, histoire que février nous fasse bien comprendre qu’on allait pas lui échapper comme cela. Et quelques jours de déprime, le temps que le bleu marine du golfe de Naples s’efface complètement de ma rétine.

Je ne saurais plus très bien dire ce qui me reste de ce premier contact avec la Péninsule. Tout est allé si vite. et malgré, ou plutôt à cause de mes yeux grands ouverts, je n’ai gardé que ces impressions décousues. A mon retour en France, curieusement, c’est surtout ce souvenir de chaleur qui m’est resté, et de ce petit détail thermique j’ai conçu toute une idiosyncrasie enveloppante, douce, chaleureuse. Confronté à sa réalité, l’Italie m’a secoué, c’était prévisible, mais sans rudesse. Aussi, contrairement à d’autres désirs fantasmés depuis longtemps, elle me donnait envie de la courtiser encore, bien que je l’aie visitée déjà.

Italia mia (5)

Vendredi 9 décembre 2005


Itinéraire
Cette fois c’est parti. Nous sommes trois dans la 106 blanche, calés entre les sacs de couchage, les sac de voyages, les bières et les cartes routières. Il doit être à peu près 17 heures, ce qui ne fait qu’un retard d’une dizaine d’heures sur l’horaire prévu. Connaissant la nonchalance dont nous sommes capable de faire preuve, mes amis et moi, nous sommes plutôt fiers de nous. En route pour Salerne !Salerne, c’est près de Naples, au sud de l’Italie. Notre amie aux origines italiennes, toujours la même (appelons-la Chiara), y vit depuis quelques mois, en Erasmus, pour y connaître les joies de l’immersion. Dès que nous avions appris la nouvelle, nous lui avions promis de lui rendre viste dès que possible. Début février, alors qu’il fait triste et gris par chez nous et que la fac est en vacances, c’est le bon moment pour se dépayser. Alors nous partons. Nous avions dû prévoir une vingtaine d’heures pour aller là-bas. Ou même rien prévu du tout.A cette époque, le simple fait de nous retrouver en voiture et de voyager était un vrai bonheur. Avec des clopes, des bières et mes potes, papotant ou méditant, regardant le paysage défiler ou le nez dans les cartes, je serais allé au bout du monde. J’assume le côté roots de cet aveu.

C’est encore un plaisir aujourd’hui, du reste. Mais nous en avons moins l’occasion. Et puis nous sommes plus sages. Et puis je bois moins. Et puis je suis non fumeur depuis le 3 avril 2004. Et puis nous vieillissons, en somme.

Bref. Nous prenons la route. Au bout de celle-ci, l’Italie. La vraie, la physique, avec des hommes et des femmes qui vivent leur vie, sans se douter que j’arrive. Ils n’auront pas fait le ménage. Il ne se seront pas endimanchés pour nous recevoir. Ils ne feront pas de manières. Ce sera l’Italie comme elle est, et non pas comme je l’ai fantasmée depuis si longtemps. J’en ai conscience, je me prépare. Et pour autant, j’appréhende un peu l’arrivée. Je suis heureux que notre périple soit si poussif, et que la route me donne encore un sursis avant d’ouvrir les yeux sur la réalité, après tant d’années passées, les yeux fermés, à imaginer.

Et nous roulons. Depuis une petite heure. On est à Langres. Il doit nous rester encore 1200 bornes ! Le temps est vraiment pourri. Il pleut un peu, mais nous rions, nous sommes excités comme des gosses. On blague, on imagine. Et ce n’est pas la petite batterie rouge sur le tableau de bord qui va saper notre bonne humeur. Je m’enquière quand même de sa signification dans le livret du constructeur, pour ne pas mourir idiot. L’alternateur ? Bof, ça doit être l’humidité.

Puis un gros bruit de mécanique détraquée sous le capot. Il faut s’arrêter. Il pleut. On aime bien quand ça part en vrille comme cela, on se demande toujours comment on va s’en sortir. Effectivement la courroie de l’alternateur est en bouillie.

Alors on cherche une maison pour téléphoner. Ca se passait encore comme cela au XXème siècle. On appelle le numéro d’assistance. Puis on attend le dépanneur. «Oh la la, les jeunes, ça ne se change pas comme ça, une courroie !» Il faut ammener la voiture au garage. On monte dans la dépanneuse.

Enfin un taxi passe nous prendre au garage. Car la voiture doit y rester deux jours. Retour à la maison.

Il est 23 heures. Je suis chez moi. J’appelle Chiara, en Italie, je tombe sur une de ses colocs. Je baragouine en italien que la voiture est cassée, qu’elles ne nous attendent pas. Je suis incapable de faire une phrase, et de comprendre ce qu’elle me raconte. Après des années à apprendre le rital, je me dis que c’est quand même minable. Je me couche. Je m’endors.

A suivre…

Italia mia (4)

Jeudi 1 décembre 2005


Giornali
Lorsque j’évoque mes représentations imaginaires de l’Italie ou de ses habitants, toute la mythologie que je m’étais inventée lorsque j’étais adolescent, tous ces éléments rudimentaires qui entretenaient mon désir, j’essaie de comprendre pourquoi ces idées étaient si imparfaites, si imprécises.Mais, en réfléchissant un peu, la réponse est assez simple. Ce désir d’Italie est une histoire d’un autre temps, une histoire du siècle dernier. C’était au vingtième siècle, et il n’était pas évident, au vingtième siècle, de se représenter précisément un pays, un peuple, une histoire. Les seuls outils dont je disposais, dans ma cambrousse, étaient quelques livres, atlas ou encyclopédies dont les illustrations, de par leur rareté, devenaient des symboles. Quelques reportages, à la télévision, quelques films de Fellini, très tard le soir, lorsque je pouvais les voir. Eros Ramazzotti, et Umberto Tozzi, aussi. Ce n’étaient que ces perles, extraites ici et là dont je m’étais fait un collier très baroque, que je gardais au fond de mon esprit comme un scapulaire de dévot.Si j’étais né dix ou quinze ans plus tard, la Toile aurait tout changé. J’aurais pu regarder la Rai, écouter la musique locale, lire mille choses sur ce pays. En toucher réellement la culture, en effleurer concrètement la société. J’aurais pu mieux voir, et mieux comprendre tous les contrastes de ce petit monde, toutes ses facettes, afin de m’en faire une conception plus réaliste.

Souvent la réalité démystifie, elle ramène certains rêves à leur juste échelle et incite à passer à autre chose.

Le hasard a voulu — mais est-ce si regrettable ? — que je n’ eusse de l’Italie qu’une vision idéale et fantasmagorique qui s’est incrustée en moi comme une légende mystérieuse que l’on n’oublie pas.

Je dois reconnaître cependant que, toutes archaïques qu’elles fussent*, mes recherches ont fait un bond en avant lorsque je suis arrivé en fac. Parce qu’une bibliothèque universitaire est un peu plus riche qu’un CDI, d’abord, et parce que quelques cours m’ont permis d’aborder la question italienne sous des angles un peu détournés, à travers l’art notamment, mais bien plus sérieux !

Mon apprentissage de la langue a également progressé dans cette grande ville où j’ai pu bouquiner des petits livres en italien, et lire la presse nationale. Le Corriere ou la Repubblica ont été les premiers outils qui m’ont permis de mettre le doigt sur les côtés les plus concrets, les plus quotidiens de la Péninsule.

C’est en ces occasions sans doute que, pour la première fois, entre un dico et mes clopes, je me suis dit que l’Italie était un sacré bordel.

A suivre…

* et de deux !

Italia mia (3)

Lundi 14 novembre 2005

Satyricon
Parenthèse dans l’histoire.Alors que j’apprenais l’italien avec mon petit manuel en 90 leçons, je suis tombé au hasard des repères linguistiques sur une expression que j’ai aussitôt retenue. Je ne sais pas très bien pourquoi. Je l’ai trouvée rythmée, joliement syncopée, comme un abracadabra italien.

Se non è vero, è ben trovato. Traduisez : si ce n’est pas vrai, c’est bien trouvé. Quelques mots qui servent à conclure une histoire dont l’authenticité n’est pas très sûre, mais dont la chute ou l’argument valaient bien qu’on la raconte quand même. Des Italiens m’ont expliqué par la suite que cette expression n’était pas si utilisée que cela, mais je l’ai quand même gardée dans un coin de ma tête.

Parfois j’y repense quand j’entends quelqu’un raconter visiblement n’importe quoi. Je me dis alors que dans certains cas, la manière de raconter ou même l’audace de le faire compensent bien l’exigence de vérité dont je fais parfois preuve avec un peu trop de rigueur.

Et puis j’ai mis ces mots en haut de cette page. Je trouve ça bien. Ca instille juste ce qu’il faut de soupçons sur le contenu de ces lignes pour que ma pudeur soit soulagée lorsque, parfois, j’ai l’impression d’en dire un peu trop…

A suivre…

Italia mia (2)

Mardi 8 novembre 2005


Cartes napolitaines... Jamais été foutu de comprendre les règles de la scopa...
L’un des grands drames de ma scolarité fut l’absence de profs d’italien dans mon bahut. Au menu : anglais, allemand, espagnol et basta. En quatrième, je choisis d’apprendre l’espagnol, langue vaguement latine tout de même, en nourrissant toutefois une rancune tenace contre cette idiome de consolation. Je crois même que j’en ai longuement voulu à l’Espagne tout entière et à ses habitants pendant de longues années pour ce petit malheur scolaire. Jusqu’où vont se nicher les obsessions, tout de même.Mais apprendre l’italien restait pour moi un passage nécessaire et évident. Je décidai donc de m’y mettre avec les moyens du bord, en l’occurence une méthode et trois cassettes, et de m’engouffrer tout seul au fond de ma chambre dans ce nouvel univers linguistique. Pour un type un peu cérébral, comme je l’étais déjà à cette époque, mon premier plaisir fut celui des tournures, de la grammaire et de l’étymologie, qui m’ont fait remonter à la bifurcation originelle, au moment où le latin, battu au fer de l’usage germanique, pris le chemin du français au dessus des Alpes alors qu’il continuait de mûrir en langues italiques au-dessous . Et je m’émerveillais d’apprendre que, malgré cette dichotomie, les deux langues avaient évolué parallèlement pour produire des tournures quasiment identiques. C’était touchant.Cet apprentissage me fit également découvrir quelques éléments d’une culture que j’avais jusque là essentiellement fantasmée. Même si ça n’évoquait que les vespa, les spaghetti et cinecittà, c’était déjà bien plus concret que mes vagues représentations de garçons de peplum aux regards de braise. Et puis la connaissance de dix mots et de trois expressions procure vite le plaisir de croire que l’on maîtrise parfaitement une langue. Au bahut, je me suis d’ailleurs vite vanté d’être un italianophone de la première heure, le fait de bien prononcer “talïatelles” et non pas “tagliatelles” suffisait pour en faire l’irréfutable démonstration.Un matin pas comme les autres, un bus s’arrêta devant le lycée. Un bus rempli d’italiens en séjour parmi nous. Un événement quasiment théologique dans ma vie routinière, qui me mit en contact avec des transalpins bien avant la date que j’aurais pu imaginer. Je n’ai jamais très bien compris du reste l’intérêt de faire venir des correspondants italiens dans un bahut où personne n’append cette langue. Je crois seulement que mon lycée, catho, et le leur, était animé par la même confrérie.

Premiers contacts, donc, avec ces garcons aux prénoms magiques, et premiers doutes, surtout, sur les qualités génétiques que je leur attribuais par axiome. Ils n’étaient pas spécialement beaux, mais plutôt boutonneux, la tignasse crade et l’air un peu abruti. Très conformes à ce que nous étions nous-mêmes, en somme. Qu’importe ! Je n’allais pas jeter au pilon toutes mes belles doctrines pour quelques malheureux contre-exemples et je décidai de m’accrocher fermement à mes convictions.

Mon amie aux origines italiennes hébergeait une de ces correspondantes. Elle s’appelait Monica, elle n’était pas très sexy, mais je suis sorti avec. Je ne saurais pas bien expliquer pourquoi. Cela ne pouvait pas être autrement, c’est tout. Notre couple improbable m’a surtout donné l’occasion de mettre enfin en pratique mes quelques notions d’italien, et de perfectionner mon art du roulage de pelles. Cette dernière activité nous permettant d’occuper nos bouches lorsque nous n’avions plus rien à nous dire. Or nous n’avons plus rien eu à nous dire après une minute de conversation, lorsque j’eus épuisé toutes mes ressources de vocabulaire et alors que nous avions quelques journées à passer encore ensemble.

Autant dire que, très vite, je n’ai plus rêvé que d’une chose : voir ce foutu bus, toujours stationné devant le lycée, se tirer fissa avec ma Monica et ses copains-copines de l’autre côté des Alpes. Quel enfer !

Cet équipage ne m’a pas laissé indemne. Outre l’écriture laborieuse d’une carte postale que j’envoyais à Monica en réponse à une lettre de sa part, couverte de «Ti voglio bene», je réalisai que l’Italie à laquelle je devais m’attendre serait bien plus prosaïque que celle dont je rêvais constamment. Contrairement à ce que me disait depuis toujours mon imagination, ce pays n’était pas fait d’un empilement de mythes, mais d’hommes et de femmes assez semblables à ceux qui m’entouraient déjà. Je commençais à me le dire en tout cas. Quant à savoir si je m’écoutais…

Par contre, une chose était certaine : en attendant ma prochaine rencontre avec l’Italie, je devais sérieusement bosser l’italien car, à présent, ça ne faisait plus de doute, j’étais vraiment nul à chier.

A suivre…

Italia mia (1)

Lundi 31 octobre 2005

L'enlèvement des Sabines - David
Si je ne voulais parler qu’un tout petit peu de moi, il faudrait au moins que j’évoque la relation ancienne et mystérieuse que j’entretiens avec l’Italie. Ancienne, car elle remonte à mon plus jeune âge, et mystérieuse car elle repose sur ce paradoxe existentiel fondamental : je n’ai aucun lien avec ce pays. Rien. Pas un gène, pas une maison de vacances. Même pas un petit quelque chose de méridional, une cousine qui habiterait à Valence. Rien de cela et même tout le contraire.Je me suis longtemps demandé d’où me venait cet intérêt. Quel en avait été le point de départ. Peut-être des histoires de la Rome antique, que l’on découvre dans les livres de la petite école. Peut-être un bric-à-brac d’impressions de gosse, mélange de paysages, de soleil, de ruines et de légendes, rapportées à ce pays étrange dont les contours dessinent une botte. C’est aussi peut-être une simple image, ou un personnage, ou une voix que j’aurais oubliés mais qui auraient impressionné mon esprit au point de l’orienter pour tout le reste du temps vers cette idée fixe.Je dois bien l’avouer également (ça me contrarie un peu d’ailleurs, car j’ai vraiment l’impression que mes attirances m’ont toujours mené par le bout du nez), j’ai appris très tôt que l’Italie avait enfanté beaucoup de ces garçons aux cheveux bruns, aux yeux marrons et à la peau mate qui me plaisaient tant, déjà tout gamin. Il y en a peut-être eu un en particulier, dans la cour de l’école ou à la télé quand j’étais vraiment jeune, mais je ne m’en souviens pas. Et je ne veux peux pas croire que ce soit ce seul aspect qui m’ait à ce point marqué. Toujours est-il qu’à l’époque, je ne connaissais rien de bien précis sur ce pays, mais j’étais au moins sûr d’une chose : il était peuplé de garçons magnifiques.Si encore on m’avait dit que le climat y était hostile, que la misère y régnait depuis toujours, je m’en serais peut-être tenu là, en me disant que c’était une consolation accordée aux malheureux Italiens de pouvoir au moins mettre au monde de beaux enfants. Mais j’apprenais qu’au contraire il faisait bon y vivre, qu’à toutes les époques on était allé y chercher l’inspiration, que la Joconde et toutes les choses brillantes et dorées qu’on voyait dans les livres venaient de là-bas…

Je n’avais donc pas dix ans quand je décidai que l’Italie était le paradis sur terre.

Conscient que ma capacité d’action était limitée par mon jeune âge, j’ai alors entrepris un vaste travail documentaire, à base de «Tout l’univers» et des quelques Astérix de la fratrie, pour préparer le jour où je pourrai m’embarquer pour la terre promise. Les choses sont devenues plus sérieuses à partir de la quatrième, quand les cours de latin où l’on évoquait ces mœurs étranges, ces histoires mythologiques obscures et libidineuses et ces récits de guerriers courageux m’ont donné l’impression d’aborder enfin pour de bon les bases du sujet.

A la même période, dois-je encore avouer, je me souviens d’une amie qui avait des origines italiennes et un frère très beau. J’ai passé des années à admirer ce type qui faisait partie des grands, ce qui ajoutait bien sûr à son prestige et à son inaccessibilité. Prestige et inaccessibilité : il était l’incarnation de ce que l’Italie représentait toujours pour moi. Bien sûr, quand on est gamin et pas trop bête, on met au point des plans tortueux au possible pour approcher ses idoles et je me suis donc mis à l’oeuvre. J’ai logiquement fini par discuter avec lui de temps en temps. Je crois d’ailleurs qu’il m’aimait bien, ce qui me confortait dans l’idée qu’il y avait bien quelque chose de compatible entre ce qu’il représentait, et moi.

Mais ce qu’il y a de plus étonnant dans ce désir d’Italie, c’est que j’aurais été bien incapable de dire ce que je désirais vraiment, concrètement. Etait-ce une ville ? Un monument ? Les traces d’un personnage que je voulais suivre ? Je n’en sais vraiment rien. Dans le souvenir qui m’en reste, ça ressemblait plutôt à une espèce de nostalgie, au sens propre, pour un paradis perdu…

Une telle mythologie personnelle et enfantine peut-elle survivre à l’âge bête ?